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Les anciens ont usé d'artifices hydrauliques pour imiter
le chant des oiseaux. Salomon de Caus, dans Les raisons des forces
mouvantes (1615) et Athanasius Kircher, dans Physiologia
Kicheriana experimentalis
(1675), en ont expliqué
le principe. Le ramage est produit par un sifflet, ou un tuyau d'orgue
aigu dont l'extrémité parlante est trempée
de biais dans un liquide. Lorsque l'on envoie, par le pied du tuyau,
de l'air à forte pression, celui-ci crée un gargouillement
qui imite le ramage de l'oiseau. Les mouvements des ailes et du
bec sont obtenus au moyen d'un cylindre garni de picots qui jouent
le rôle de cames simplifiées.
La fascination pour les chants d'oiseaux perdura tout au long des
siècles. Dans la culture orientale, par exemple, la forte
symbolique de l'oiseau, élevé au rang de psychopompe,
fit qu'aussi bien le Fils du Ciel, maître du Céleste
Empire, que les sultans de la Sublime Porte furent de grand acquéreurs
qui stimulèrent les recherches en vue d'une plus parfaite
imitation.
La solution la plus simple consista tout d'abord à réduire
la taille des mécanismes de serinettes automatisées.
Nous examinerons plus loin le cas des cages
à oiseaux chanteurs
qui sont ainsi équipées.
Il faudra attendre la fin du XVIIIe siècle pour
que les horlogers des montagnes neuchâteloises (on dit que
ce sont les célèbres Jaquet-Droz) découvrent
que l'utilisation d'un sifflet dans le corps duquel coulisse un
piston commandé par une came (en place d'un tuyau d'orgue
à son fixe) permet de rendre fidèlement toutes les
inflexions du chant. Une autre came assure la coupure de l'air afin
de respecter les silences d'articulation.
Comme se sera le cas pour les boîtes à musique à
lames vibrantes, la miniaturisation des mécanismes a permis
de les inclure dans toutes sortes d'objets tels que des montres,
des bracelets, des pommeaux de cannes, des pistolets, des corbeilles,
des cages, mais surtout
dans des tabatières.
Tout homme un tant soit peu raffiné, se devait, au XVIIIe
siècle, d'avoir sur lui une ou plusieurs tabatières.
Le talent des orfèvres, tant suisses que français,
s'est exprimé avec virtuosité en la matière.
Les oiseaux chanteurs trouvèrent ainsi un réceptacle
idéal auquel ils ajoutèrent l'enchantement par l'artifice
de la surprise.
En effet, en agissant sur une targette, l'oiseau, qui jusqu'ici
était abrité sous un couvercle (souvent gravé
ou peint de décors en émail), se dresse et virevolte.
Il tourne la tête, ouvre le bec, bat de la queue et des ailes
au rythme de l'articulation du chant. Un minuscule soufflet, qui
s'agite au rythme d'un cur de colibri, donne toute la force
à son chant. Puis, sa prestation accomplie, le petit artiste
disparaît aussi soudainement qu'il est apparu.
Les grands maîtres de la discipline furent les suisses Jacob
Frisard, les Jaquet-Droz et les Brugier. Au XIXe siècle,
en France, les Bontems fabriquèrent sur ce principe des tabatières,
de nombreuses cages, mais aussi des buissons animés d'oiseaux
sautant de branches en branches qui firent leur réputation.


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Système pour chant d'oiseau
d'après les anciens

Mécanisme d'oiseau
d'après Salomon de Caus

Tabatière à oiseau chanteur

Mécanisme d'une
tabatière à oiseau

Came de chant

Oiseau en train de chanter

Sonagramme d'un chant d'oiseau en tabatière
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